Pourquoi carafer un vin ?
Deux raisons assez différentes peuvent nous amener à passer un vin en carafe:
- aérer un vin jeune pour qu’il se présente sous son meilleur jour, on parle alors d’aération
- décanter un vin âgé, pour séparer le vin de son éventuel dépôt, on parle alors de décantage (ou décantation).
La façon d’opérer ne sera pas la même dans les deux cas et les carafes à utiliser ne seront pas non plus les mêmes. Parler de "décanter un vin jeune" est en quelque sorte un abus de langage.


Comment carafer un vin pour l'aérer ?
Le carafage d’un vin jeune est très facile : il suffit de transvaser. En règle générale, on fera glisser le vin le long de la paroi mais on peut choisir une méthode plus brutale si le vin est particulièrement robuste ou massif, ou encore si le temps de carafage sera court.
L’important est de laisser ensuite reposer le vin un certain temps. En règle générale, 1 heure convient à la plupart des cas. On prolongera à 3 ou 4 heures sur les vins plus denses et/ou très jeunes et on pourra envisager 6-8 heures comme étant un minimum pour les vins de type monstres du nouveau-monde (vins de dégustation pure, vins massifs assez alcoolisés).
Les formes de carafes sont nombreuses et variées mais une mode assez récente met les carafes larges et plates en avant. C’est regrettable : si ces carafes peuvent à la rigueur convenir aux vins de type « monstre de dégustation », les vrais vins gastronomiques, ceux qui nous raviront d’aise à table, seront bien mieux mis en valeur dans une carafe plus étroite.
La présence ou non d’un bouchon sur une carafe n’a que peu d’importance, sauf si vous placez votre carafe à l'extérieur (le vent a tendance à faire partir les arômes). D'autre part, les carafes qui versent le vin sans faire de goutte se comptent hélas sur les doigts de la main. Pour les autres, seule une dextérité hors du commun permet de les éviter.
Si vous n’avez pas de carafe, sachez aussi que le simple transvasement dans une autre bouteille permet d’obtenir les même effets bénéfiques : l’aération se produit en effet essentiellement au moment du transvasement. Il est même possible de faire un second transvasement pour remettre le vin dans sa bouteille d’origine. L’autre bouteille doit être bien entendu parfaitement propre et le temps d’attente doit être doublé ou triplé si le vin est au niveau du goulot. Si l’on remet le bouchon, le transvasement peut même se faire 12 ou 24 heures avant dégustation.
Une fois le carafage effectué, veuillez à placer la carafe dans un lieu à bonne température. Le problème est surtout délicat pour les vins blancs. Les petites carafes ont l’avantage de pouvoir être placées au réfrigérateur ou dans un seau à glace. Sinon, utilisez la méthode du transvasement dans une autre bouteille.
Laisser la bouteille simplement débouchée (sans transvasement) pendant un certain temps ne remplace pas un passage en carafe : la surface en contact avec l'air libre est bien trop petite et surtout il n'y a pas eu d'aération du vin. Cela permet d'éviter les problèmes de réduction, rien de plus. Si vous prélevez un peu de vin, la surface de contact sera alors augmentée mais l'effet n'aura rien à voir avec un carafage.
Depuis quelques temps, de nombreux gadgets apparaissent pour chercher à remplacer la carafage. Le plus souvent, ils se placent directement sur le goulot de la bouteille pour opérer juste au moment de verser le vin dans le verre. J'admire l'inventivité des créateurs mais ces inventions se concentrent beaucoup trop sur la seule aération. Le carafage, c'est une aération légère suivie d'un temps de repos. Ces gadgets nous proposent une aération importante et de supprimer le temps de repos. Ce n'est pas vraiment possible d'arriver au même résultat. Vous pouvez d'ailleurs tester vous-même en secouant violemment votre verre (non sans avoir oublié de le fermer avec la paume de la main) ou en secouant une bouteille presque pleine. Vous verrez une modification, souvent fugace, due au réveil brutal mais vous n'aurez jamais l'harmonie atteinte après une carafage.
Pour clore le sujet, sachez enfin que les mots « carafer » et « carafage » ne sont pas encore reconnus comme faisant partie de la langue française. Nous pouvons toutefois espérer que ce sera prochainement le cas, tant ces deux vocables sont couramment employés aussi bien par les amateurs que par les professionnels.